Préface de « Vers une volonté sans faille »

Nous voici, en 2022, au centenaire de la publication de Vers une volonté sans faille, paru pour la première fois dans sa version originale américaine en 1922. Son auteur, pourtant célèbre aux États-Unis, est pratiquement inconnu de nos contrées. Cependant, sa sagesse intemporelle a beaucoup à nous offrir, même après un siècle : ainsi, cette traduction française inédite est à la fois un anniversaire, mais aussi un véritable cadeau.

henry hazlitt
Henry Hazlitt.

Le lecteur apprendra qu’Henry Hazlitt était journaliste, ayant entre autres travaillé aux célèbres Wall Street Journal et New-York Times. Toutefois, c’est principalement pour ses ouvrages en économie qu’il connut la renommée, en particulier pour L’économie en une leçon[1] ou sa critique assidue du plus célèbre ouvrage de John Meynard Keynes[2]. Pourtant, ici, c’est un livre de développement personnel que nous découvrirons, écrit au tout début de sa carrière. Sa deuxième œuvre, pour être plus précis. 

À l’heure actuelle, suite à la qualité parfois critiquable des ouvrages de ce genre (où les auteurs tendent à se répéter constamment page après page pour, finalement, expliquer un principe qui peut se résumer en à peine quelques lignes), un énième écrit peut inspirer une certaine forme de suspicion.

Cependant, rappelons-le : ce livre a été écrit en 1922, loin de notre époque où le marché du développement personnel a permis l’émergence de divers gourous et autres coachs malhonnêtes plus avides d’argent que de bien-être. Mais en réalité, c’est l’auteur de cet ouvrage qui fait que celui-ci se différencie de toutes les autres œuvres de développement personnel : parce qu’il est imprégné de son propre parcours et des leçons qu’il en a tiré. En l’analysant, nous y découvrons un homme avec une volonté sans pareille, ou plutôt, devrait-on dire, une volonté sans faille.

Ainsi, en se penchant sur le parcours de l’homme, découvre-t-on qu’il grandit dans une relative pauvreté, et fût orphelin de son père alors qu’il n’était qu’un jeune bébé. Grandissant dans la misère, sa mère l’inscrivit à six ans au Girard College de New York, un établissement privé spécifiquement dédié à venir en aide aux familles sans père.  S’en suivra bien plus tard un déménagement à Brooklyn, où il étudiera au City College afin de devenir psychologue. Hélas, il devra rapidement abandonner ses études afin d’aider financièrement sa mère, qui après s’être remariée, deviendra veuve pour la seconde fois.

Sans diplôme, sans argent et sans avenir : voilà ce qu’aurait pu être le destin du jeune Hazlitt. Mais c’était sans compter, bien sûr, sur sa volonté sans faille. Relatant ce passage de sa vie, il nous illustre notamment l’importance du libre marché, dont il deviendra un fervent défenseur :

Je n’avais aucune compétence. Je trouvais donc un emploi, et je restais deux ou trois jours avant d’être licencié. Cela ne m’a jamais surpris ou contrarié, car je lisais le Times tôt le matin, je parcourais les annonces et j’avais pratiquement un emploi le jour même. Cela montre ce qui se passe lorsque vous avez un libre marché. Le salaire minimum n’existait pas à l’époque. L’aide sociale n’existait pas, sauf peut-être dans certains endroits où vous pouviez obtenir une soupe pour quelque chose, mais il n’y avait pas d’aide sociale systématique. Vous aviez un libre marché. Et donc je me retrouvais généralement dans un emploi le lendemain, et je me faisais virer trois ou quatre jours après. […] Je n’avais pas les compétences. Mais à chaque fois, je continuais à apprendre quelque chose, et finalement, je gagnais environ 3 ou 4 dollars[3] par semaine.

Particulièrement doué pour l’écriture, le jeune Hazlitt décidera de devenir journaliste, et entra au Wall Street Journal en 1914 à seulement vingt ans. Une année plus tard, il écrit son tout premier livre, Thinking as a Science[4]. Par la suite, il travaillera également chez d’autres quotidiens célèbres, tels que Nation ou le New York Times, ce qui fera de lui l’un des journalistes les plus célèbres et influents des États-Unis au XXème siècle. Ainsi, contrairement à l’affirmation de certaines idéologies collectivistes, Hazlitt démontra que la pauvreté et la misère ne sont pas une fatalité ni une résultante de « l’exploitation capitaliste » et que l’on reste ainsi maître de son destin, à condition d’avoir de la volonté.

On pourrait conclure un peu vite qu’en travaillant à des officines tels que le New-York Times (dont on connaît la réputation plutôt orientée à gauche aujourd’hui), qu’il aurait pu céder à la facilité de la conformité des opinions politiques de l’époque, afin de vivre une existence paisible et s’offrir d’un statut confortable. Cependant, Hazlitt ne renonça jamais à ses convictions, et n’hésita pas à se dresser seul contre tous s’il l’estimait nécessaire, refusant d’adopter toute attitude conciliante. Ainsi, ses critiques acerbes envers le New Deal et des accords Breton Woods lui coûteront ses postes respectifs de Nation et du New York Times. Cela ne découragera pas Hazlitt, pour qui les principes et l’intégrité étaient plus importants que la gloire et la fortune, peu importe fut le prix à payer (une leçon que le lecteur découvrira dans ce livre).

À notre époque où la conformité est considérée comme synonyme de vérité, et où toute hypothèse alternative s’éloignant de près ou de loin est considérée comme « complotisme », « paranoïa », « danger pour la démocratie », et autres qualificatifs agréables, Hazlitt est définitivement un exemple à suivre et à imiter. Il nous enseigne en effet une jolie leçon de courage, d’exemplarité, de moralité, mais surtout, et c’est ce qui nous intéresse le plus, de volonté.

Ainsi, bien que Vers Une Volonté Sans Faille ne soit que son deuxième livre, et que l’on pourrait ainsi penser à tort qu’il ne soit qu’un écrit de jeunesse, on constate en réalité à quel point tout ce qui y est détaillé constitue les grands principes qui l’ont forgé tout au long de sa vie. Car cet ouvrage constitue aussi, d’une certaine manière, son autobiographie, voire son journal personnel.

Là où les auteurs actuels tentent plutôt en effet de caler leur pensée sur d’anciens écrivains célèbres, considérés comme « sages » (on pense notamment à Nietzsche ou les stoïciens, très en vogue actuellement), et ne font en réalité qu’un travail de vulgarisation sans réellement apporter quelque chose qui leur est propre, il n’en est rien dans l’œuvre de Henry Hazlitt. Cette œuvre, c’est lui, car tout son être s’y ressent, et c’est cet aspect unique qui en fait toute l’aura.

Ainsi, s’il y a un fil rouge que l’on peut identifier dans toutes les étapes du parcours de Hazlitt, c’est bien cette remarquable volonté sans faille. Nous n’en avons ici énuméré que quelques illustrations, auxquelles une simple préface ne saurait rendre justice. Vous découvrirez également d’autres principes la composant, parmi lesquels l’habitude, la discipline, la concentration, l’effort, le courage moral, l’humilité, et encore bien d’autres éléments que nous vous laisserons le plaisir de lire, et que vous pourrez appliquer dans votre vie au quotidien.

À présent, il n’en tient qu’à vous de découvrir les secrets de cette fameuse volonté sans faille, en compagnie de ce héros qu’est Henry Hazlitt. Que chaque jour, ses leçons vous accompagnent : à n’en pas douter, vous deviendrez une meilleure personne, plus mature, plus sage, plus forte et plus libre, comme le fut Henry Hazlitt autrefois.

Daivy Merlijs
Le 10 décembre 2022


[1]    HAZLITT, Henry, L’économie en une leçon (Éditions de l’Institut Coppet, 2018). Ouvrage traduit disponible au lien suivant :      https://editions.institutcoppet.org/produit/henry-hazlitt-leconomie-en-une-lecon/

[2]    HAZLITT, Henry, The Failure of the « New Economics », An Analysis of the Keynesian Fallacies (D. Van Nostrand Company Inc, 1959). Version anglaise préfacée par Murray N. Rothbard disponible au lien suivant :   https://mises.org/library/failure-new-economics-0

[3]    Soit, au vu du taux de change actuel et de l’inflation, entre 54 et 72$ de 2022.

[4]    Que l’on pourrait traduire par « La Science de la Réflexion ».